Secrets d’Histoire de Sombacour

Petite introduction…

La France d’autrefois était formée par des centaines, voire des milliers de petits pays façonnés par la nature et par l’histoire. De taille variable, ils pouvaient coïncider avec un bailliage, une seigneurie, une région naturelle. Au nord-ouest de Pontarlier, nettement individualisé par la nature, le Val d’Usier semble bien avoir été l’un de ces petits pays. Un tout petit pays en vérité, puisque sur une dizaine de kilomètres, au contact d’un versant boisé et d’un fond en prairie s’égrènent trois villages seulement, du sud-ouest au nord-est : Sombacour, Bians et Goux les Usiers. Un territoire d’un peu plus de 5 000 hectares. Région déprimée se tenant autour de 700 mètres d’altitude au pied du Mont Séverin qui culmine à 900. Au sud le Val est fermé par le « cul de Boin » et l’on ne peut gagner Pontarlier que par le Col des Roches qui s’ouvre au niveau de Sombacour. Dans le Val le climat est déjà rude avec une moyenne de 1500mm de précipitations et une température moyenne d’été ne dépassant pas 16 °, le printemps et l’automne sont de courte durée. Au total une région qui forme bien une entité géographique.

A l’origine du peuplement, le château qui dominait Sombacour, ou la paroisse qui très tôt s’établit à Goux ?

En la pénombre documentaire du haut Moyen Age, il est impossible de le savoir : la première mention du château n’apparaît dans les documents qu’à l’extrême fin du XIIe siècle, et celle des trois villages qu’au XIIIe siècle. Quoiqu’il en soit, c’est la faim de terres qui a poussé les hommes à défricher le fond du val où, à la différence de la Chaux d’Arlier voisine, rien n’atteste une occupation celtique. Antérieure certainement aux premiers documents, l’occupation du Val n’en a pas moins été assez tardive.

C’est une originalité qu’il partage avec d’autres régions du Haut-Doubs, celle de Mouthe par exemple, d’altitude sensiblement plus élevée. Mais à Mouthe les seigneurs, en l’occurrence les prieurs de St Simon, puis les Jésuites de Dole ont toujours été bien présents. Ici on suit assez facilement la chaîne des seigneurs qui de l’abbaye d’Agaune et des sires de Salins, aboutit à Bonnaventure-Denis Vernier et au marquis de Monnier en passant par la maison de Joux, celle de Rougemont et un Watteville. Mais ces multiples changements, sans doute aussi les partages de la seigneurie, l’éloignement et la non résidence des seigneurs expliquent une moins forte pression qui n’empêche pas les retours offensifs, notamment au XVIIIe siècle, à propos de la jouissance des forêts.

L’élément moteur du Val, au temps de la civilisation traditionnelle, se situe en son centre même, ce sont ses trois communautés d’habitants, si étroitement imbriquées, à population longtemps si comparable qu’il est difficile de les dissocier : la paroisse primitive est à Goux, mais les foires et la justice se tiennent à Sombacour. Chaque communauté d’habitants a ses prudhommes et ses assemblées, mais longtemps les communaux restent indivis entre eux. Il y a vraiment une entité, le Val d’Usier, qui se distingue même par l’architecture de ses maisons. Ici c’est bien la maison bloc groupant tout sous un même toit, mais on ne trouve pas la cheminée à tué si caractéristique d’autres petits pays tous proches.

Extrait du livre “le val d’usier”, Malfroy, Guiraud, Olivier éditions Cêtre site internet : www.editions-cetre.com

A venir, chaque mois, des extraits sur l’histoire de Sombacour racontée grâce à l’ouvrage ci dessus. Ce mois-ci :

Une circulation des eaux capricieuse

Cet épisode glaciaire n’a pas eu une action suffisante pour enrayer les phénomènes karstiques fort nombreux dans le secteur. Rappelons brièvement que ces derniers sont liés à la nature perméable des terrains calcaires, ce qui détermine des processus d’érosion et des formes de relief très particulières qui se développent aussi bien en surface qu’en profondeur. En d’autres termes, le relief karstique est caractérisé par l’association de formes souterraines (galeries, grottes) et de formes subaériennes dont le développement est souvent dans la dépendance des premières : dolines, cavités diverses, gouffres plus ou moins comblés en sont les manifestations géomorphologiques les plus tangibles.

C’est ainsi que de nombreuses dolines et dépressions du même genre parsèment la surface topographique. Il s’agit de creux circulaires ou elliptiques de quelques mètres, souvent dissymétriques et généralement moins profonds que larges. Leur existence est liée à de micro-conditions structurales et climatiques. On distingue ainsi des dolines d’effondrement liées à l’affaissement de voûte de cavités sous-jacentes et des dolines de dissolution. Ce deuxième type provient de la dissolution du calcaire, surtout lorsque les eaux sont riches en gaz carbonique comme c’est le cas à la fonte des neiges. Les pertes de substance par des fissures ou diaclases provoquent en surface des tassements donnant naissance à des poches de dissolution. Si certaines de ces dépressions sont isolées, on remarque pour d’autres des groupements préférentiels. C’est le cas, entre autres, des dolines qui jalonnent le talweg de la vallée sèche coincée entre Pissenavache et l’anticlinal de Chaffois. Il en est de même près d’Evillers.

Mais il y a des phénomènes encore plus curieux et plus importants dans la contrée. Les calcaires jurassiques sont affectés par un réseau karstique qui draine les eaux de surface et désorganise l’hydrographie normale. Pierre Chauve, professeur à l’Université de Besançon, qui a étudié les problèmes hydrologiques du Val, a constaté les faits suivants :

« Le val des Usiers est assez plat de sorte que les écoulements temporaires ne suivent pas son tracé, mais le recoupent et se perdent dans le plateau. Ces écoulements ne subsistent qu’en période humide et sont dus à la concentration des précipitations sur les bassins marneux situés à l’amont sur Pissenavache. Parmi ces ruisseaux temporaires, il faut citer le Bief de Sombacour aux Planches. Les autres drains, plus réduits, provenant de Bians et de Goux sont drainés par une vallée qui aboutit au creux de Renale, point bas topographique où s’est développé un beau gouffre. Des pertes situées aux Planches ou le long de la vallée sèche qui aboutit au creux de Renale, absorbent les eaux de ruissellement. La capacité d’absorption de la plupart des exutoires est limitée, ce qui se traduit par des inondations temporaires des points bas. Les eaux infiltrées dans les calcaires alimentent les sources de la vallée de la Loue… ».

Les eaux des diverses sources ont ainsi tendance à se perdre, absorbées par le sol. Aussi n’a-t-on que des ruisseaux temporaires à l’origine des difficultés d’approvisionnement en eau que les communes du Val ont rencontré de tout temps. Tel est le cas des sources des Marnes et du Bidarion à Sombacour, de Vons à proximité de Bians, de la Combe Buhin près de Goux.

La structure géologique et les accidents tectoniques sont donc à l’origine de drainages souterrains complexes donnant naissance à des résurgences dont la principale est celle de la Loue. La Loue prend en effet naissance à 540 mètres d’altitude sur le territoire de la commune d’Ouhans. C’est un véritable canyon de quelques 250 à 300 mètres de profondeur qui barre le Val d’Usier de façon nette au Nord-Est. E. Fournier, R. Nuffer ont montré que cette rivière est alimentée :

- par les pertes du Doubs, en aval de Pontarlier ;
- par une partie des eaux d’infiltration du bassin fermé d’Arc-sous-Cicon ;
- par les pertes du Drugeon, moins connues que celles du Doubs ;
- par des gouffres et entonnoirs qui dominent la source au Sud et au Sud-Ouest et qui se trouvent par conséquent dans le Val d’Usier.

L’ensemble des pertes du Drugeon – particulièrement importantes au petit lac de Bouverans et vers les Granges Narboz – forme par exemple un cours d’eau souterrain dont on peut constater l’existence au fond du puits de Jardelle. Il s’agit d’un gouffre de 125 mètres de profondeur verticale, situé sur la commune de Chaffois, à l’ouest de la localité. Ce cours d’eau chemine de façon souterraine par le Val d’Usier et vient grossir les eaux de la source de la Loue. Il est encore alimenté par les eaux de ruissellement du Val, captées par une série de fissures et de gouffres. Les plus connus sont le Cul de Boin près de Sombacour, le gouffre rebouché de Baumes près d’Ouhans ou le Creux de Renale dont on a déjà parlé. C’est une magnifique excavation naturelle, en forme d’amphithéâtre, de 17 mètres de profondeur. Il constitue un des plus beaux sites naturels du Val, mais a été scandaleusement transformé en dépôt à ordures. Indépendamment de la nuisance esthétique, c’est une source de pollution pour les niveaux aquifères avec lesquels il est en relation.

On a également, plus au Nord, une circulation souterraine Ouest-Est jalonnée par les dolines de la vallée sèche d’Evillers et qui alimente une petite source sur la rive gauche de la Loue.

L’anastomose des réseaux souterrains et leur relation avec la source de la Loue ont d’ailleurs été confirmées par diverses expériences faites avec un puissant colorant, la fluorescéïne.

Ce qui frappe aussi dans le Val d’Usier, c’est la disparition des eaux superficielles. L’écoulement s’organise en profondeur, facilité par la présence de ces multiples fissures, gouffres et entonnoirs dont nous avons donné maints exemples et qui, parfois, peuvent poser problème ainsi qu’en témoigne leproblème du gouffre de Sombacour.

La hantise du « feu du ciel »

A plusieurs reprises, le conseil municipal de Sombacour s’inquiète des risques d’incendie. En 1849 (1er août), il décide de « faire une patrouille de nuit dans le village », en particulier pendant la saison des moissons, l’époque la plus critique « pour le fléau dont nous parlons ». Cette patrouille sera faite de « deux individus, à tour de rôle parmi les habitants de 18 ans et au-dessus » ; aucun individu ne pourra s’y soustraire.

Pourquoi cette crainte ?

On se souvient d’abord des incendies que connut Sombacour dans le passé ; mais il y a aussi tous ceux qui éclatent dans les villages du Haut-Doubs tout au long de cette période. Qu’on en juge !

En 1825, le feu détruit 50 maisons à Labergement Sainte-Marie, dans les premiers jours de juillet, et également la cure et l’église ; « et même les cloches et les vases sacrés ont été fondus ». On fait une quête à Sombacour ; en outre « on prélèvera 4 pieds sapin sur la marque de l’affouage 1826 de la valeur de 80 francs » pour être donnés aux habitants de Labergement, soit en nature, soit en argent (… « pour être distribués aux incendiés, comme ils trouveront convenir » ).

Incendie à Bouverans dans la nuit du 30 avril au 1er mai 1844 : la quête produit peu, « vu le peu de blé que les cultivateurs ont récolté l’année dernière » ; le conseil de Sombacour vote la somme de 500 francs, « à porter au budget sur l’exercice suivant ».

Incendie à Chaffois en 1850 : le maire de Sombacour est nommé par le Sous-Préfet (2 septembre) « commissaire pour la vérification des pertes occasionnées par le feu du ciel du 12 du mois dernier ». Nouvelle lettre du Sous-Préfet le 4 août 1853 : « un incendie épouvantable vient de réduire en cendres la plus grande partie du village de Frasne. Près de 500 personnes se trouvent sans asile et dénuées de toutes ressources ».

1854, incendie à Déservillers et à Septfontaines ; on abattra onze sapins pour « secourir les incendiés » : 200 francs iront à Déservillers ; 60 à Septfontaines, et le surplus dans la caisse municipale.

1855, incendie à Chapelle d’Huin ; le secours sera de 150 francs et on vendra 20 pieds de sapin sur les communaux. La même année, dans la nuit du 9 au 10 juillet, le feu éclate à Boujailles ; à nouveau, Sombacour vend 20 pieds de sapin pour un secours de 150 francs. En septembre encore, Levier connaît deux incendies ; un grand nombre d’habitants ont perdu tout leur mobilier et leur récolte ; le conseil vote 400 francs sur les fonds libres de la commune, mais cette somme sera couverte « par une vente de bois »…

La présence du feu est donc fréquente, et chaque fois s’est manifestée la solidarité des habitants de Sombacour – qui, chez eux, ont pris des mesures pour lutter contre le fléau. Revenons par exemple sur un arrêté du maire, Longchampt, en date du 9 novembre 1824, « pour empêcher la préparation du lin pour le battre pendant la nuit avec des chandelles ». Très dangereux ! déclare le magistrat de Sombacour ; ainsi a-t-on vu l’imprudence d’une femme qui avait mis du lin dans un four trop chaud – ce qui avait « mis le feu à la cheminée »…

L’arrêté comprend 3 articles :

-  « il sera défendu à tout habitant dans la commune de Sombacour de battre ou préparer son lin avant les six heures du matin et après cinq heures du soir sous peine d’être amendable ».
- Il est défendu également de « battre ou préparer du lin dans les appartements » (la poussière s’attache à la suie des cheminées, d’où le risque d’incendie) ; ces travaux ne peuvent se faire qu’en « dehors des maisons, comme il est d’usage dans quelques communes voisines ».
- Dans trois mois, obligation est faite à chaque particulier d’avoir une porte de four en fer, « afin de pouvoir tenir ferme ledit four au cas où le lin qui est dedans vienne à s’allumer (ce qui n’arrive que trop souvent) » ; car, lorsque la porte est en bois, on ne peut résister, « ce qui est très dangereux pour causer un incendie ».

Autre document : un rapport du 8 avril 1843 qui fait le bilan du matériel de lutte contre le feu dont dispose la commune. Soit 3 pompes, dont une grosse montée sur quatre roues, et 2 petites sur brouettes (elles sont « logées convenablement mais tenues mal propres ! », 24 seaux en toile imperméable et « tous les boyaux nécessaires ». Il faudra, ajoute le rapport, acheter 4 crochets et 4 échelles…

LE CHATEAU D’USIER ET LE BOURG

Quasiment mythiques et légendaires dans bien des esprits parce qu’ils ont aujourd’hui complètement disparu, le Château d’Usier et le Bourg sont mentionnés par quelques textes attestant – s’il en était besoin – de leur existence.

Le Château est signalé par une charte du XIIe siècle ; il était rattaché à la maison de Joux, et fut détruit successivement au XVe siècle par les Suisses, puis au XVIIe siècle par les « Suédois ».

Il est délicat de tirer de ces seuls faits une conclusion sur l’importance de cette fortification ; fut-il détruit parce qu’il ne s’agissait que d’une construction modeste, sans grande garnison, et donc facile à prendre ? ou, place forte relativement importante, sa destruction devenait-elle impérative pour assurer l’affaiblissement de la région, briser ou retarder son éventuel redressement militaire ? Les deux hypothèses sont plausibles, mais ne sont que des hypothèses.

Les archives communales de Sombacour conservent un document sur lequel est figuré le Château d’Usier. La construction est ici assez imposante, mais on ne peut attribuer à ce simple dessin une valeur de relevé architectural fiable. La question reste donc entière, et seule l’archéologie pourrait nous apporter de sérieux éléments de jugement. On peut cependant avancer, sans grand risque d’erreur, qu’il s’agissait d’une maison forte dotée de murailles, et, certainement, d’une importance inférieure au Château de Joux.

Le témoignage d’un anonyme du XVIIIe siècle renforce cette hypothèse ; la description qu’il nous a laissée permet en outre de reconnaître assez aisément l’emplacement de l’ensemble :

« C’est au dessus de Sombacour qu’était autrefois le Château de la maison d’Usier. Les ruines qui en restent font voir que les bâtiments en étaient très solides et les logements très spacieux. Sa position le rendait redoutable et difficile d’accès : il était placé sur le haut de la colline dont un côté domine toute la plaine et l’autre est terminé par un rocher qui par son extension resserre le passage en forme de gorge étroite pour entrer à Sombacour, ce qui le rendait maître de ce passage ».

Nous avons pu effectivement reconnaître sur le terrain la situation supposée de ce château, dont il ne reste actuellement rien d’apparent. Une végétation assez dense a envahi la quasi totalité des lieux, dissimulant complètement les quelques ruines qui pourraient encore demeurer en place.

L’ancien bourg n’a pas eu droit à plus d’égards de la part du temps : il n’en subsiste rien. C’est là une situation assez ancienne, puisqu’au XVIIIe siècle notre chroniqueur anonyme notait déjà :

« …de toutes les maisons du Bourg qui étaient autour du château il n’en reste qu’une ».

Ce bâtiment esseulé et épargné le fut peut-être jusqu’à une époque relativement récente (premier quart du XXe siècle) ; nous avons pu effectivement nous-mêmes enregistrer un témoignage oral, basé sur le souvenir et la tradition, faisant état d’un édifice appartenant à l’ancien bourg ; il a maintenant malheureusement lui aussi disparu. A l’heure actuelle, seule une « couverture » photographique aérienne précédant une fouille archéologique systématique, pourrait nous apporter de précieux renseignements sur l’implantation exacte, l’importance et la configuration du Château d’Usier et du Bourg.

En conclusion, nous ne pouvons que constater l’existence de l’un et l’autre, et regretter qu’il n’en subsiste rien, pas même des ruines.

Le Tacot ou tramway à Sombacour

LE TRAMWAY D’AMATHAY-VESIGNEUX

Dès avant 1914, la mode est aux tacots : le « tramway Pontarlier-Mouthe » avait été inauguré le 29 avril 1900. La ligne de Pontarlier à Amathay-Vésigneux avait été déclarée d’utilité publique par la loi du 20 mars 1913 et un arrêté préfectoral du 16 mai de la même année avait désigné les territoires des communes d’Evillers, Goux, Bians, Sombacour, Chaffois, Houtaud et Pontarlier comme devant supporter les travaux de construction de ce chemin de fer d’intérêt local. Le tracé pouvait paraître capricieux ; il s’agissait certes de desservir le maximum de communes, mais les contraintes du relief n’étaient pas moins exigeantes.

Entre Houtaud et le Val d’Usiers, il fallait vaincre la Côte du Fol et le Mont Séverin ; la seule possibilité était de contourner l’obstacle par l’Ouest – d’où le détour par Chaffois et les Entreportes (qui, par ailleurs, permettait la liaison avec Levier). Après la desserte du Val, le tracé reprenait la route de Nord vers Evillers et Amathay.

La guerre devait retarder la mise en chantier du projet, la procédure ne se poursuivant qu’en 1920, avec les arrêtés préfectoraux du 22 mars (ouverture des enquêtes) et des 28 mai et 5 juillet (déclarant « cessibles » les propriétés ou portions de propriétés désignées par les états parcellaires pour la construction du chemin de fer). Le 16 septembre 1921, un nouvel arrêté préfectoral fixe les sommes à offrir, pour indemnités, aux propriétaires et autres intéressés dans les « propriétés expropriées ». La ligne, comprise entre la limite des communes d’Amathay-Vésigneux et d’Evillers, et la station de Pontarlier mesure 25 896.98 m ; elle demandera un assez grand nombre d’expropriations. Sur la commune d’Evillers, 69 propriétaires sont touchés, 39 à Goux, 119 à Bians, 68 à Sombacour, 12 à Houtaud. Un supplément au Journal de Pontarlier du 27 mars 1920 avait publié un « Avis » au public concernant ces mesures :

« Le public est prévenu qu’en exécution de l’arrêté de M. le Préfet du Doubs, en date du 22 mars 1920, et en conformité des articles 4, 5 et 6 de la loi du 3 mai 1841 sur l’expropriation pour cause d’utilité publique, les plans, profil en long et notice descriptive du tracé, le tableau indicatif des ouvrages à exécuter, le plan parcellaire et tableau indicatif des propriétés à acquérir pour l’établissement du chemin de fer d’intérêt local d’Amathay-Vésigneux à Pontarlier, dans les communes d’Evillers, Goux-les-Usiers, Bians-les-Usiers, Sombacour, Chaffois, Houtaud et Pontarlier, ont été déposés à la mairie desdites communes et y resteront jusqu’au 10 avril 1920 inclusivement, afin que chacun puisse en prendre connaissance. Il est également déposé à la mairie un registre destiné à recevoir les déclarations d’élection de domicile, à faire en vertu de l’article 15, parag.2, de la loi du 3 mai 1841. Un registre d’enquête est ouvert à la mairie pour recevoir les déclarations et réclamations qui seront faites pendant le même délai. Après ce délai, toutes les pièces et observations seront remises à M. le Sous-Préfet de Pontarlier, président de la Commission d’enquête. »

Les travaux se poursuivront jusqu’en 1930. Mais les conditions d’exploitation vont poser quelques problèmes, que le cadre de cette étude ne permet pas d’étudier en détail. Retenons seulement que dans sa séance du 12 octobre 1929 le Conseil Général avait dû ajourner sa décision sur cette question et que le Conseil d’arrondissement du 4 aoùt 1930 donnait des signes d’impatience :

« Le Conseil renouvelle ses vœux antérieurs relatifs à la mise en exploitation au plus tôt de la ligne Amathay-Pontarlier-Levier et demande qu’une voiture automotrice soit tout au moins –dès maintenant – mise en service d’une façon permanente. »

La ligne était prête ; elle avait même fonctionné le dimanche 13 juillet à titre exceptionnel pour les fêtes d’aviation organisées à Pontarlier. Un service avait été organisé entre Amathay (12h20) et la capitale du Haut-Doubs (13h50). Il faudra attendre septembre pour que la mise en exploitation soit enfin décidée. Le mercredi 3, une commission administrative spéciale présidée par le préfet « a procédé à la reconnaissance du raccordement des lignes de Besançon à Pontarlier par Amathay, terminus actuel, et Andelot à Pontarlier par Levier. Les constatations faites ayant paru satisfaisantes, un avis officiel portera à la connaissance du public l’ouverture du trafic pour le dimanche 7 septembre.

L’horaire était le suivant :

Pontarlier 6.12 16 Houtaud 6.19 16.08 Chaffois 6.27 16.17 Entreportes, bifur. 6.38 16.27 Arrivées de Levier 6.35 16.24 Sombacour 6.45 16.35 Bians-Sombacour 6.48 16.39 Bians-les-Usiers 6.51 16.43 Goux-les-Usiers 6.54 16.46 Evillers 7.05 16.57 Granges Maillot 7.15 17.07 Amathay-Vésigneux 7.23 17.15 Amancey 7.45 17.39 ————————- Besançon Saint-Paul 9.14 19.08 Besançon Saint-Paul 6.10 16.02 ————————- Amancey 7.46 17.39 Amathay-Vésigneux 8.05 17.58 Granges Maillot 8.14 18.07 Evillers 8.20 18.13 Goux-les-Usiers 8.32 18.25 Bians-les-Usiers 8.34 18.27 Bians-Sombacour 8.40 18.33 Entreportes, bifur. 8.50 18.43 Départs sur Levier 8.50 18.43 Chaffois 8.59 18.52 Houtaud 9.07 19 Pontarlier 9.14 19.07

Les débuts furent sans doute modestes ; le 20 septembre, une publicité parue dans Le Pontissalien rappelle les avantages du chemin de fer :

« La Compagnie a l’honneur de rappeler au public qu’un service par automotrices confortables fonctionne régulièrement entre Pontarlier et Besançon, SANS CHANGEMENT DE TRAIN. La durée du trajet est de 3 h 02…Les gares d’Evillers, Goux-les-Usiers, Bians-Sombacour, Entreportes, Chaffois et Chapelle d’Huin sont ouvertes au service des marchandises, grande et petite vitesse ».

En 1931, la « Compagnie des chemins de fer du Doubs » accordera une réduction aux voyageurs « sur les réseaux de Pontarlier – Mouthe – Foncine et de Pontarlier – Besançon » pour un parcours supérieur à 40 kilomètres, les nouveaux tarifs étant applicables dès le 1er janvier. Il est vrai que le train s’arrêtait souvent (il suffit de compter les haltes et les gares dans le Val d’Usiers, séparées par un trajet de 3 minutes !) et que la moyenne horaire était bien basse (3 heures pour aller de Pontarlier à Besançon ! même si l’itinéraire prenait quelques chemins détournés !). Pourtant, on prit l’habitude d’utiliser le tacot entre Amathay et le Val d’une part et Pontarlier de l’autre, surtout les jours de foires et de marchés. En 1931, décision sera prise de « dédoubler le train n° 2 » au départ d’Amathay-Vésigneux les jeudis à partir du 2 avril. On pouvait ainsi quitter Amathay à 7 h 32 et arriver à Pontarlier à 8 h 38, passer la matinée en ville, à la foire ou chez les commerçants locaux, et reprendre le train à 12 h 20, sans être obligé d’attendre l’horaire normal de 16 h.

La circulation automobile était encore peu dense à l’époque ; pourtant le tracé de la ligne devait provoquer quelques accrochages. Le 4 juin 1931, un accident se produit aux Entreportes ; la voie ferrée traverse la route « à un endroit où la visibilité est loin d’être parfaite » ; une auto se dirige sur Levier et « se trouve tout à coup en présence du tramway qui débouchait sur la route ». La rencontre est brutale et les dégâts matériels importants. D’autre part, la concurrence de l’autocar commence à se faire sentir sur le parcours Besançon – Pontarlier. Le tramway d’Amathay poursuivra malgré tout sa carrière de chemin de fer d’intérêt local jusqu’après le seconde guerre mondiale…

Extrait du livre “le val d’usier”, Malfroy, Guiraud, Olivier éditions cêtre site internet : www.editions-cetre.com

Le problème de l’eau au 19 ème siècle

Quelle est donc la situation en ce domaine au début de la période ? Dans une lettre (14 janvier 1824) à Monsieur le baron Daclin, Sous-Préfet, le maire de Sombacour, Longchampt, explique la pénurie d’eau. A Sombacour, écrit-il, il n’y a que quatre petites fontaines, dont les sources sont peu abondantes dans les temps de sécheresse ; elles ne peuvent suffire aux habitants : il serait urgent de construire un réservoir d’eau, « qui serait alimenté par l’une de ces sources, qui le remplirait dans les temps pluvieux ».

D’autre part, un arrêté (approuvé par le Sous-Préfet et le Préfet en mars 1825) règlemente l’utilisation de l’eau dans les « bassins » du village. Les attendus de l’arrêté constatent que « les femmes se permettent de laver toute sorte de vilénies dans les bassins réservés pour faire boire le bétail, de sorte qu’une partie ne boive qu’avec répugnance et que l’autre ne boive pas ». Les bassins, en bois, sont pourtant divisés en deux parties : la première partie reçoit l’eau de la source « destinée à faire boire le bétail » ; la deuxième est réservée à « laver les linges et autres choses ». Dans certains quartiers de la commune, on lave indifféremment dans les « deux bassins de la fontaine » ; il faut alors conduire les bestiaux dans les fontaines des autres quartiers, « qui sont propres », ce qui « met la disette d’eau » dans toute la commune. L’arrêté interdit de laver du linge « ou autre objet » dans le premier bassin, sous peine d’amende.

S’il arrive qu’il n’y ait pas d’eau dans le deuxième bassin et peu dans le premier, la défense demeure, « vu que le besoin de faire boire est plus urgent que de laver quelques linges » ; d’ailleurs il y a des « réservoirs d’eau » dans le village où l’on peut prendre de l’eau pour laver (l’arrêté ne dit pas la qualité de l’eau dans ces réservoirs…). L’arrêté sera publié, affiché ; on mettra encore, sur chaque fontaine, « une plaque en gros caractères annonçant la défense ».

Quant aux travaux nécessaires, ils ne seront réalisés que lentement. C’est seulement en 1834 que sera construit – en pierres- le réservoir à « la source dite fontaine du Perron ». La « préparation du terrain », l’achat des pierres à la carrière et leur transport, la « taille des pierres pour la construction », le ciment, du « fer et du chêne pour la porte et la serrure » – et le 1/10e de bénéfice pour l’entreprise – font monter le devis (28 juin 1834) à 128.25 francs. En 1837, une première fois, puis en 1838, Sombacour demande à l’administration forestière l’autorisation de vente pour une partie du quart de réserve, afin de financer la distribution d’eau. Car les fontaines sont « établies dans un état très coûteux », les conduites (en bois de Sapin) doivent être réparées souvent ; on a même dû abandonner une bonne fontaine « au dessus du village » parce qu’elle demandait trop d’entretien. Il faudrait rétablir cette fontaine, refaire les conduites « en fonte et en fer »… et vendre 12 à 13 ha de vieux chênes, qui pourraient valoir environ 6 000 francs. L’opération ne nuirait pas à la forêt (cette vente ne représenterait d’ailleurs que le 1/5e de la réserve), puisqu’on remplacerait les vieux chênes par « de jeunes plants de même essence » et par des sapins. Il fallut attendre ; le Sous- Préfet avait seulement répondu à la demande du maire qu’il était « à croire que l’administration forestière s’en occupait » !

En 1843, le financement continu à se révéler difficile, d’autant que la commune a été autorisée à acheter une partie du Bourg « pour se procurer de l’eau ». Le devis de la conduite d’eau de cette source du Bourg est dressé par l’architecte Pompée. Mais il n’y a pas assez de « fond de caisse » : on n’exécutera qu’une partie du projet en 1843, jusqu’à l’embranchement du chemin vicinal de Sombacour à Chaffois. C’était compter sans le mécontentement de certains habitants ; la conduite ne va pas assez loin dans le village, et justement là où il n’y a pas encore de fontaine (…et les autres fontaines sont éloignées de ce quartier !).

Il faudra bien tenir compte de ces protestations : le conseil décide « d’achever la conduite », mais étant donné le montant du devis (5 234 francs), on ne mettra pas en place les bassins prévus ; on pourra, en attendant, se servir des vieux bassins « qui sont vers les sources ». Les bassins de la fontaine du Bidarion ne seront installés qu’en 1854 : on vendra des sapins pour couvrir les frais…

Extrait du livre “le val d’usier”, Malfroy, Guiraud, Olivier éditions cêtre site internet : www.editions-cetre.com

Le gouffre de Sombacour

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A la fin de l’année 1971, la route qui conduit de Sombacour à Bians se fissure et l’effondrement du sous-sol entraîne un affaissement de la chaussée. Ce n’est pas la première fois que cela se produit mais le phénomène est suffisamment important pour que les services de l’Equipement décident de couper la route.
On ne peut en effet continuer à laisser passer les véhicules, les poids lourds entre autres, sans risque d’accident ; ce qui impose une déviation de près de 5 kilomètres. On découvre la cause du phénomène. La route enjambe un véritable gouffre aux dimensions imposantes, d’une quinzaine de mètres de profondeur, au fond duquel coule un petit ruisseau qui disparaît sous terre. Le village s’est trouvé ainsi coupé en deux parties. Heureusement, un passage contournant l’accident a permis aux riverains de pallier l’inconvénient né de cette situation, car divers contretemps ont retardé l’exécution des travaux qui ont duré plus d’un an.
Extrait du livre “le val d’usier”, Malfroy, Guiraud, Olivier éditions cêtre site internet : www.editions-cetre.com